Polygamie : la député UMP Chantal Brunel se base-t-elle sur la Sharia ?

A peine la cacophonie autour de l’interdiction du port du voile intégral en France s’est estompée avec le vote de la loi (en vigueur d’ici printemps 2011), qu’un nouveau dossier en ligne de mire agite l’Assemblée Nationale : la polygamie.

Condamner la polygamie plus sévèrement : la mission que s’est donnée Chantal Brunel

Le 02 novembre dernier, la député UMP de Seine et Marne, Chantal Brunel, a déposé une proposition de loi à l’Assemblée visant à condamner la « polygamie de fait » . Le projet de loi prévoit une sanction pénale d’un an d’emprisonnement, et de 75 000 euros d’amende à tout homme polygame « qui impose par la contrainte une union continue avec plusieurs femmes. ». Le but officiel étant de lutter contre les fraudes aux prestations sociales « escroquées sur le dos du contribuable » et de libérer les femmes de cette situation «aussi inextricable qu’avilissante ». En réalité, le projet vise la polygamie pratiquée par les musulmans, certainement un phénomène de société pour inquiéter la député, c’est bien connu en France tous les musulmans sont polygames…

Dans son rapport rendu public fin septembre, la député précise que

« le délit de polygamie condamnerait le mari qui impose à plusieurs femmes une union de fait, caractérisée par une stabilité, une dépendance et une continuité. Cette définition serait suffisamment large pour englober certains délits collatéraux potentiels (violences, fraude…) et suffisamment étroite pour que ne soient pas concernés les époux pour lesquels mariage et fidélité ne font pas bon ménage ».

Pointant du doigt une enquête de la Commission Nationale Consultative des droits de l’Homme datant de 2006 qui recense quelques 20 000 familles polygames en France (soit 200 000 personnes qui seraient concernées) la député martèle qu’« Il est temps de mettre fin à une pratique qui n’est ni plus ni moins qu’une violence faite aux femmes, et qui n’a pas sa place dans notre pays ».

Vers une interdiction du cumul des mariages religieux, comment contrôler ?

En France, la polygamie est déjà sanctionnée, mais selon Chantal Brunel, ce dispositif est incomplet car il ne concerne que les mariages contractés civilement, et la député souhaite élargir cette interdiction aux mariages religieux notamment musulmans : « De nombreux polygames se marient religieusement à plusieurs femmes et n’en déclarent qu’une comme épouse officielle, les autres pouvant toucher l’allocation de parent isolé. » explique t-elle. C’est pourquoi, elle demande à ce qu’ « Aucun imam autoproclamé ne doit pouvoir célébrer de mariage religieux sans avoir vérifié l’existence d’un mariage civil ». Précisant n’avoir aucun grief contre la communauté musulmane. » rapporte l’Express.

Il y a quand même de quoi d’interroger sur la manière dont l’État laïque français va contrôler les mariages religieux puisque aucun papier officiel n’est donné lors de la célébration d’un nikah (mariage musulman). Par ailleurs, contrairement à ce que l’on pourrait penser l’imam n’est pas indispensable pour célébrer un nikah, n’importe quel musulman peut le faire :

il n’est pas obligatoire que ce soit un imam qui fasse le « nikâh » / « fâtiha ». Il est vrai qu’il est arrivé que ce soit le Prophète qui a marié des personnes, comme dans le récit de la femme venue se proposer en mariage (rapporté par al-Bukhârî), comme dans un autre récit (rapporté par Abû Dâoûd, n° 1857, 1858). Cependant, les Compagnons n’ont pas systématiquement eu recours au Prophète pour célébrer leur mariage, comme le montre le mariage de ‘Abd ur-Rahmân ibn ‘Awf (rapporté par al-Bukhârî). De plus, le Prophète n’a pas célébré des mariages en tant que imam de la mosquée mais en tant que dirigeant sur le plan administratif (« sultân« )… il est faux de croire que le « nikâh » / « fâtiha » n’est pas valable ou est de moindre valeur s’il n’a pas été fait par un imam. Il ne faudrait pas oublier qu’il n’y a pas de clergé en islam, et que n’importe quel musulman peut faire un « nikâh » / « fâtiha » (avec l’accord du responsable (walî) de la femme bien entendu). Voir l’intégralité du texte sur La Maison de l’islam

Cela se vérifie sur le terrain, la majorité des imams ne prennent pas le risque de célébrer des « nikah polygames » et lorsqu’ils s’agit de nikah monogames des précautions sont prises (demande du livret de famille, à minima la confirmation du rendez vous à la mairie). Si le projet de loi ne condamne pas l’adultère mais la polygamie basé sur un mariage religieux, comment la justice différenciera-t-elle un couple polygame d’un couple infidèle si ce n’est qu’en prenant en compte le texte coranique, encore une belle preuve d’hypocrisie. On donne à la laïcité le sens que l’on souhaite.

Le projet de loi prévoit de retirer le droit au polygame accusé de ce nouveau délit de toucher les allocations familiales, et leur attribution devra passer « par un tuteur extérieur afin qu’elles bénéficient à la femme et à ses enfants » ajoute t-elle. Comme indiqué sur son blog officiel, la député ne se cache pas de jouer sur les mots, dans l’optique d’ « éviter de poursuivre ceux qui ont des relations extra-conjugales » pour lesquelles sa proposition de loi n’envisage pas de sanctionner l’infidélité du mari ayant des maitresses, puisque cela relève d’une affaire privée et non d’État à son sens.

Chantal Brunel, qui est également Rapporteur Général de l’Observatoire de la parité, et qui a sorti son premier ouvrage en janvier 2010 qui s’intitule « Pour en finir avec les violences faites aux femmes », n’aura pas manqué de mentionner l’affaire Lies Hebbadj qui a selon elle « fait resurgir une réalité que je combats depuis le début de mon mandat : la polygamie »

Un combat qu’elle ne mène pas seule. En juin dernier, une proposition de loi similaire à celle de Mme Brunel, avait été déposée au Sénat par Nicolas About, député centriste des Yvelines, dans le but de « créer un délit de polygamie, d’incitation à la polygamie, avec circonstances aggravantes pour fraude aux aides sociales, et à inciter les victimes à la décohabitation, à l’insertion sociale et professionnelle et à l’assimilation à la communauté française ».

Liès Hebbadj, Paul Bocuse : l’un qualifié de polygame, et l’autre ?

L’affaire Liès Hebbadj aura laissée des traces amères chez certains députés au siège de l’Assemblée Nationale… On se souvient de ce musulman dont l’une des femmes Sandrine Moulères-Hebbadj avait été verbalisée par un policier alors qu’elle conduisait en niqab. Liès avait été menacé par le ministre de l’Intérieur, Brice Hortefeux, d’être expulsé du territoire français en étant déchu de sa nationalité, soupçonné de polygamie et de fraudes aux prestations sociales. Le gouvernement avait fait état de sa cohabitation avec plusieurs femmes, touchant l’allocation de parent isolé.

Peu de temps après cette affaire, le député des Yvelines, Nicolas About avait fait le même constat que celui de Mme Brunel, l’occasion était trop belle. En se basant sur cette même enquête de 2006, celui ci dénonce un « laxisme » du droit français actuel concernant ce phénomène de la polygamie et propose d’y remédier à travers cette nouvelle loi. : « Ce laxisme tient en réalité au fait qu’il existe une faille dans notre système juridique, en matière de concubinage. Si le concubinage existe dans notre code civil (à l’article 515-8), il n’est presque pas réglementé. »

Dans son exposé, Nicolas About, souhaite le vote d’une loi d’interdiction de la polygamie qui s’étendrait là aussi vers les mariages religieux et coutumiers, l’arbre qui cache la forêt selon lui :

«(…) les mariages religieux ou coutumiers, prononcés en France ou à l’étranger, ne sont pas pris en compte dans cette définition. Ils ne peuvent donc accréditer l’accusation de polygamie. En droit civil français, le mariage religieux n’est pas reconnu, seul compte le mariage civil. Il est donc possible de vivre simultanément avec plusieurs femmes, et autant d’enfants, sans être marié avec elles : cela n’est ni juridiquement condamnable, ni pénalement répréhensible. On peut donc être polygame « de fait », sans être pour le moins du monde inquiété par les autorités françaises. »

En attendant, le cas de Liès Hebbadj n’est pas un cas isolé en France. A l’image de Paul Bocuse, cuisinier de renom, trois fois étoilé au guide Michelin, qui assume sa polygamie devant les médias, sans en être inquiété. Il ne le sera d’ailleurs probablement jamais, pas assez barbu et ses femmes ne sont pas voilées.

Au sujet de ces 3 femmes, Raymonde, Raymone et Patricia, le cuisinier plaisante dans un article du Parisien : «Il y en a une pour le déjeuner, une pour le thé et une pour le dîner ». « C’est ma vie, elle est faite comme ça ».  Tandis qu’au Figaro, il confie sereinement : « Trois femmes, pourquoi pas ? J’ai toujours eu besoin d’être rassuré, entouré. »

Par Oum Maryam

By Younes

2 thoughts on “Polygamie : la député UMP Chantal Brunel se base-t-elle sur la Sharia ?”
  1. Sallam ça fait presque sourire le genre de valeurs qu’ils veulent véhiculer ds la société française :on ne veut pas inquièter les maris infidèles qui ont des relations sans lendemain avec différentes femmes qui tomberont peut être enceinte et desquelles ils ne reconnaîtront pas les enfants (avec tout ce que l’on sait comme séquelles que cela peut engendrer d’un point de vue psycho-affectif des enfants sans père ni repère)mais on veut éradiquer de la surface de la planète des hommes responsables qui ont une relation stable et durable avec plusieurs femmes souvent consentantes desquelles ils auront des enfants qu’ils reconnaîtront et élèveront du mieux qu’ils le peuvent.Le message c’est quoi: « soyez une ordure ».Bizarre pour une société du progrès quelle régression dire qu’il y a pas si longtemps l’adultère était un délit et qu’il sert encore de faute ds les cas de divorce,drôle de féministe cette chantal brunel???

  2. Wa alaykum assalam néema, oui tout a fait daccord avec toi,

    La société nous montre clairement qu’ellle cautionne l’adultère, les relations extra conjugales, l’infidélité, et condamne la polygamie qui est une réelle alternative à toute cette perversité et ce manque de responsabilités de certains hommes qui préfère collectionner les femmes, quitte à ce que derrière il y ait des enfants qu’ils refusent d’assumer, et ces femmes isolés seules, ne sachant plus quoi faire de leur progéniture..

    Chantal Brunel prétend défendre le droit et la dignité des femmes, mais ici elle ne fait que les enfoncer encore plus ! Qu’elle aille jeter un oeil sur les conditions des femmes seules avec enfants receuillies dans les associations et foyers, car leurs maris respectifs les ont dégagés du domicile familiale, remplacées par une autre !

    De tout façon, lorsque c’est pour stigmatiser et dénigrer l’Islam, les politiciens n’en rateront pas une, quitte à être incohérent dans leur vision des choses, quitte à préférer que le mari trompe sa femme avec une autre, plutôt que ce dernier prenne une seconde épouse dans le halal..

    Wassalamu alaykum !

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