Des négociations concernant un projet de construction d’une mosquée pour les musulmans de Barbès, dans le 18ème arrondissement de Paris, seraient peut être en voie de remédier au problème des prières de rue organisées les vendredi rue Myrha. Une solution qui permettrait de calmer les ardeurs de groupuscules d’extrême droite et ultra-laïques.
La caserne de pompiers transformée en mosquée
Jeudi dernier, Dalil Boubakeur, recteur de la mosquée de Paris, accompagné de l’imam de la mosquée de la rue Myrha, le cheikh Salah Hamza et de hauts fonctionnaires de la Préfecture de police, ont procédé à la visite d’une caserne de sapeurs – pompiers désaffectée, laissée à l’abandon, en vue de la transformer en un futur lieu de culte.
Après quelques mois de recherche, la Préfecture de police s’est décidée sur cette caserne. « Le lieu, inoccupé depuis quatre ans, se situe à 500 mètres à peine de deux stations du métro« , précise un fonctionnaire. « La proximité d’un centre laïque d’hébergement de nuit pour sans-abri ne pose pas de problème car l’islam a une tradition d’aide envers les pauvres et le site sera accessible par deux voies d’accès distinctes« .
L’édifice situé boulevard Ney, au nord de Paris, comprend deux grandes salles d’une superficie respective de 1200 et 800 m², et si le projet aboutit, la future mosquée pourra alors accueillir jusqu’à 2700 fidèles après le mois de Ramadan, dès le 16 septembre prochain.
Au delà de fournir un espace cultuel sécurisé et décent pour les musulmans du quartier de la Goutte d’Or et de ses alentours, ce projet semble bien tombé pour débloquer une situation de crise entre ces derniers, et le reste des habitants du quartier, excédés pour la plupart, de voir la place publique envahie par ce genre de rassemblement chaque vendredi.
« Nous sommes encore en phase exploratoire »
Pourtant malgré l’enjeu important de ce projet, le recteur de la Grande Mosquée de Paris se montre quelque peu réticent : « Certains représentants des fidèles émettent encore quelques réserves. Nous sommes encore en phase exploratoire.» explique t-il.
Les gestionnaires du dossier estimeraient que l’endroit en lui même présente encore quelques inconvénients d’ordre sanitaire : la présence d’une partie élevée du plafond poserait problème au niveau du chauffage et de la climatisation. Quant au niveau religieux, le recteur souligne que l’orientation du bâtiment n’est pas configuré en direction de la Mecque.
D’autre part, l’inconvénient ne réside pas qu’au niveau architectural, mais aussi au niveau dogmatique. Si la future mosquée voit le jour, elle sera prévue pour rassembler sous un même lieu de culte, les pratiquants maghrébins de la Mosquée Khalid Ibn Walid située rue Myrha et les adeptes de confréries africaines Tijâniyya ou Mourides, qui fréquentent d’ordinaire la mosquée voisine de la rue Polonceau.
«Les deux rites sont différents, mais la Mosquée de Paris est prête à trouver une solution pour débloquer la situation. L’idée de nommer un imam commun et consensuel, qui gérerait l’ensemble du lieu de culte, est envisageable.» confiait Dalil Boubakeur, jeudi au Figaro.
Dans une optique de respecter à la lettre la loi de 1905 prônant la séparation distincte de l’Église et de l’État, le coût des travaux et de la location du site de façon provisoire seront entièrement à la charge des associations cultuelles, bien que ce point fasse encore l’objet de vives discussions entre les protagonistes du projet. Daniel Vaillant, Maire PS du 18ème arrondissement signale qu’« il n’est pas question que la ville en fasse cadeau » en précisant que le hangar sera proposé à la vente aux associations musulmanes du quartier concerné à hauteur de « 6 à 7 millions d’euros ».
Selon les pouvoirs publics, on recenserait près de 11.000 places dans les mosquées et lieux de prière de la capitale, pour environ 90.000 pratiquants, ce qui expliquerait en grande partie l’émergence des prières faites à ciel ouvert. Des prières publiques organisées peut être pour signaler ce déficit important, et faire prendre conscience de la gravité du problème. Alors que les comités islamophobes identitaires y voit là une invasion illégale et faite exprès. Du coté de la préfecture de Police, le message a apparemment été passé : « C’est insuffisant et nous nous mobilisons pour trouver des lieux», affirme un haut fonctionnaire.
La future mosquée du Boulevard Ney constitue un premier pas vers la résolution du problème de ce déficit de places, et elle ne sera peut être pas la dernière car dès 2013, l’Institut des cultures d’islam ouvrira ses portes et offrira 2.500 places supplémentaires aux fidèles.