Méditations autour du verset coranique de la Sourate Az-Zalzala (La Secousse) :
Allah dit dans le Coran : فَمَن يَعْمَلْ مِثْقَالَ ذَرَّةٍ خَيْرًا يَرَهُ وَمَن يَعْمَلْ مِثْقَالَ ذَرَّةٍ شَرًّا يَرَهُ
« Quiconque fait le poids d’un atome de bien le verra, et quiconque fait le poids d’un atome de mal le verra. » (Sourate Az-Zalzala, versets 7-8)
Ce verset constitue la base de notre méditation. Sa compréhension profonde est fondamentale pour saisir une vérité essentielle de la croyance d’Ahl al-Sunnah wal Jama’a : l’entrée au Paradis n’est jamais la conséquence directe de nos bonnes actions, aussi sincères et conformes à la Sunna soient-elles. En effet, aucune créature ne mérite véritablement le Paradis en vertu exclusive de ses actes, mais plutôt par la miséricorde divine.
Allah souligne dans le Coran :
« Sans la grâce d’Allah envers vous et Sa miséricorde, nul d’entre vous ne serait jamais purifié. Mais c’est Allah qui purifie qui Il veut. » (Sourate An-Nour, verset 21)
Le Prophète (ﷺ) explique cette réalité dans un hadith rapporté par Aïcha (qu’Allah l’agrée) : « Personne n’entrera au Paradis grâce à ses œuvres. » Les compagnons demandèrent : « Même pas toi, ô Messager d’Allah ? » Il répondit : « Même pas moi, sauf si Allah m’enveloppe de Sa miséricorde et de Son pardon. » (Rapporté par Al-Boukhari et Mouslim)
Ainsi, il existe une certitude absolue, ne souffrant aucune exception, que seuls le Fadl (la grâce) et la Rahma (la miséricorde) d’Allah sont à l’origine de l’entrée au Paradis.
Cependant, certains versets semblent suggérer une causalité directe entre les actions et l’entrée au Paradis, tels que :
« Voici le Paradis dont vous avez hérité pour ce que vous faisiez auparavant. » (Coran, Sourate Al-A’raf, verset 43) ou encore : « Entrez au Paradis pour ce que vous faisiez. » (Sourate An-Nahl, verset 32)
Ces versets font référence au concept de sababiya (la causalité), mais pas à une contrepartie absolue (muqâbala). En effet, les causes sont nécessaires mais insuffisantes à elles seules pour produire un résultat : par exemple, un rapport charnel est une cause nécessaire mais pas suffisante pour avoir un enfant. De même, les bonnes œuvres sont nécessaires pour espérer atteindre la miséricorde d’Allah, mais ne la garantissent pas automatiquement.
Pourquoi faisons-nous alors des actions ? Parce que ces actes nous placent dans une situation favorable pour recevoir la Rahma (la miséricorde) d’Allah. L’objectif spirituel recherché par le croyant est précisément de se trouver là où se répandent les bénédictions et les faveurs divines.
Si nous pensions mériter le Paradis par justice pure, nous serions perdants, car Allah nous a précédés dans les bienfaits. Pendant plusieurs années de notre vie, nous recevons d’innombrables bienfaits divins sans être même soumis à la moindre obligation. Par ailleurs, toutes les obligations qu’Allah a prescrites dans la Charia sont exclusivement bénéfiques pour nous-mêmes. Ainsi, même lorsque nous accomplissons ces obligations, nous ne faisons que répondre partiellement aux innombrables bienfaits d’Allah sur nous.
De plus, Allah, par Sa générosité immense, multiplie par dix au minimum chaque bonne action, tandis qu’Il ne multiplie jamais les péchés. Ceci montre clairement la miséricorde prépondérante d’Allah envers Ses serviteurs.
Par ailleurs, lorsque nos actions seront pesées, il est clair qu’elles comporteront toutes une part d’imperfection due à notre négligence, notre insouciance ou notre laxisme. Ainsi, même nos meilleures œuvres comportent inévitablement des défauts.
Alors pourquoi Allah pèse-t-il les actions, si ce n’est pas pour déterminer notre entrée au Paradis ou en Enfer ? Ce jugement des œuvres sert à établir les degrés de récompense au sein même du Paradis, qui possède de multiples niveaux et stations spirituelles.
Le Prophète (ﷺ) a dit : « On dira à celui qui connaît le Coran par cœur : « Récite et élève-toi en degrés ; ta station sera au niveau du dernier verset que tu réciteras. » » (Rapporté par Tirmidhi)
Ainsi, les actions déterminent les degrés élevés du Paradis, mais l’entrée initiale dans le Paradis elle-même reste conditionnée exclusivement par la miséricorde divine. Les péchés, notamment ceux du cœur (jalousie, orgueil, rancœur), sont en réalité les plus graves et répandus parmi les gens ; c’est pourquoi la miséricorde d’Allah demeure notre unique salut le jour du Jugement.
Allah, dans Sa sagesse, mentionne dans ce verset le bien avant le mal : « Celui qui fait le poids d’un atome de bien le verra… », car Sa miséricorde devance Sa colère, et Son amour pour le bien prime sur la rigueur envers le mal.
La science infinie d’Allah nous enveloppe constamment, à chaque instant. Il connaît tout de notre être, chaque pensée, chaque état d’âme, chaque action secrète ou apparente. Cette conscience permanente du regard divin doit générer en nous à la fois une vigilance constante et une profonde pudeur (haya’)vis-à-vis d’Allah. Cette conscience de Son regard doit nous conduire à un degré d’ihsan : adorer Allah comme si on le voyait, car si on ne Le voit pas, (avoir conscience que) Lui nous voit.
Conclusion : Développer une posture humble devant Allah Le Sublime
Pour conclure, méditons sur cette merveilleuse parole de l’imam Ash-Shâfi’i, un joyau spirituel qui nous enseigne une précieuse leçon d’humilité : « J’aime les vertueux, mais je n’en fais pas partie ; Peut-être par leur amour obtiendrai-je l’intercession. Je déteste celui qui commerce par les péchés, Bien que nous ayons, hélas, la même marchandise. » (Imam Ash-Shâfi’i)
C’est précisément cet état de cœur—une profonde conscience de nos limites, une sincère humilité devant notre Seigneur—que le croyant ne doit cesser de cultiver. Ce verset coranique nous invite ainsi à bannir toute forme d’autosatisfaction (‘ujb) et d’arrogance spirituelle, et à vivre continuellement dans la reconnaissance de l’immense générosité et miséricorde divine (et la crainte de les perdre).
Magnifique rappel, barakalahou fik !!! Qu’Allah vous récompense en bien en ce mois béni !