Les Chroniques d’Oum Zaza : « C’est RIEN, ça passera… »

Farid tombe par terre, saigne du genoux et voilà que quatre adultes l’entourent et lui crient « C’est riennnnn, c’est finiiiiii »… L’enfant apeuré et en détresse hurle alors de toutes ses forces pour faire comprendre à tous les adultes autour de lui que si, il a mal !! Qu’il se fasse mal, qu’il ait eu peur, qu’il soit triste ou en colère, on ne peut nier les sentiments d’un être humain. Adulte, on a les moyens de s’exprimer et d’être pris au sérieux  le plus souvent, alors que l’enfant ne peut compter que sur nous…

Adulte, ça énerve, ça frustre…

Madame, vous arrivez à la maternité avec des contractions toutes les cinq minutes, et la sage femme vous glisse avec les sourcils sérieux de remontrances : « Roh madame, crier comme ça ne changera rien, toutes les femmes passent par là, re-saisissez-vous ! »… D’un coup c’est son cou que vous avez envie de serrez de toutes vos forces pour mieux faire passer votre douleur…

Monsieur, vous rentrez d’une dure journée de travail, prise de tête au bureau, et cerise sur le gâteau : quelqu’un a encastré gentiment l’aile droite de votre voiture sur le parking de la gare, sans laisser de mot bien évidemment… Difficile d’arriver avec le sourire et de faire comme si de rien n’était, et voilà que madame râle : « Tu fais toujours la tronche, c’est bon c’est rien, c’est que du matériel, tu ne vas pas en faire une maladie ! » … Vous vous levez sans un moment, vous ne voulez pas EN PLUS commencer une scène, les rideaux sont fermés, le dernier acte clos…

Madame, vous raccrochez d’une discussion houleuse, votre mère ne comprend pas pourquoi vous avez fait le choix de n’inviter qu’un nombre restreint de personnes pour la aqiqa de votre premier enfant, cet évènement mériterait au moins la location d’une salle afin d’accueillir toute la famille ! Vous faites une tête de trois mètres de long, comment se fait-il qu’elle ne comprenne pas ? Là votre amie arrive pour boire le thé : « Olalalala… Il faut comprendre ta mère, elle a envie de faire les choses en grand, arrêtes de te prendre la tête c’est rien ! Tu ne vas quand même pas gâcher cette belle après midi ! ». Décidément, si même votre meilleure amie ne cherche pas à comprendre vos choix, il vaudrait mieux écourter le thé…

Enfant, c’est très inquiétant…

Ilhem, 3 ans et demi, vient de tomber de sa super draisienne rose, elle s’est écorchée le coude, et ne peux plus bouger le bras. Elle se met à hurler, instinct naturel pour prévenir les adultes aux alentours qu’elle est en détresse, et là voici ses parents et ses deux oncles qui se ruent autour d’elle en criant « C’est rien ! Lève toi ! Tu es folle de crier comme ça tu vas ameuter les voisins ! ». Ilhem, désemparée crie alors plus fort, car vraisemblablement ils n’ont pas compris qu’elle souffrait ! Et elle se fait fâcher de plus belle ! #BUG

Mathilde, 7 ans, craint toujours autant le monstre qui se cache sous son lit le soir, elle est parfois tétanisée à l’idée que sa mère éteigne la lumière, et comme cette dernière refuse de laisser sa porte entre-ouverte, c’est devenu un rituel qui agace tout le monde, et qui la rend malheureuse, elle geint jusqu’à ce que ses paupières se ferment… « Tu es grande maintenant, arrête ces bêtises, il n’y a rien sous ton lit ! »

Abderrahmane, 4 ans, court derrière le chat et tombe sur le menton. Meskin ses dents se cognent et il crie de douleur. Sa grand mère accourt, le soulève du sol en deux dixième de seconde, hurle « Tout va bien !!!! C’est riennnn !!!  » et l’assoie sur le lavabo pour lui mettre un gant froid sur le menton. Bons réflexes, mais en plus de la chute Abderrahmane a eu un ticket gratuit pour le grand huit et une séance de cinéma : »Psychose » d’Hitchcock ! Il ne pleure plus, il n’y arrive même plus…

Humour noir

Nous ne jugeons personne, plutôt des actes qui ne rassure ni n’apaise. Nous sommes absolument tous maladroits, sans exception, mais connaître des parades pour mieux réagir face à des situations quotidiennes nous permet d’équilibrer notre comportement, de réagir différemment lorsque l’émotion laisse place à la raison…

Dire simplement à un enfant « Tu dois avoir mal, je comprends que tu pleure ainsi, tu saigne un peu ! Viens, nous allons passer de l’eau dessus »  calmera à 90% les pleures et les cris. L’enfant est rassuré car son appel a été entendu, et il sait que l’adulte le prend en charge afin de le soigner, ou de l’écouter… « Mathilde, je sais que tu as toujours peur que ce monstre t’embête le soir, ça doit être difficile de fermer les yeux et d’imaginer ce que tu aimerais faire demain, chez tata. Je suis forcée d’éteindre la lumière de ta chambre, mais dis moi, qu’est ce que je peux faire pour t’aider à chasser ce méchant monstre sous ton lit qui t’ennuie chaque soir au coucher ? ». En deux semaines maxi c’est fini !

Pour nous adulte c’est la même chose, la sage femme pourra dire à la future maman : « Ça vous fait du bien de crier j’imagine ! Avez vous essayé d’expirer lorsque la contraction est là ? ». Elle lui propose une alternative, et si la maman préfère crier elle doit la rassurer : « La douleur la plus belle au monde ! Vous êtes courageuse ! C’est très bien… ». La femme dont le mari rentre exténué et miné se doit de retenir ce type de remarques contre productives. S’il semble contrarié, il a une raison, et même si cela vous semble superficiel, ça ne l’est pas pour lui. Il y a d’autres façons de remonter le moral à une personne que de l’accuser de faire la tête « pour rien » : « C’est compréhensible que tu sois contrarié après une journée pareil ! Que puis-je faire pour te redonner un peu le sourire ? » Et là, vous sortez du congélateur sa glace préférée pour vous empiffrer avec lui ! Une femme contrariée moralement alors qu’elle vient d’accoucher peut vite tomber dans une petite dépression post-natale. Sa mère ne comprend pas ses choix, et sa meilleure amie en remet une couche. Il suffit de lui dire par exemple : « Tu es déçue que ta mère ne comprenne pas ton souhait de n’inviter que tes proches pour la ‘aqiqa ? Peu importe la décision FINALE que tu prendras, je serai là pour te soutenir ! » L’après midi entre fille se passera alors à merveille, d’une douceur et d’une complicité sans égal !

Même si la personne face à vous, enfant ou adulte, vous oblige à réagir, pour son bien, il faut le faire de la façon la plus délicate possible. Vous serez plus entendu en marquant votre soutien, qu’en niant son désarroi, sa colère, sa douleur ou sa peine… Rien de tel pour fermer le dialogue que le fameux « C’est rien, ça passera… », cette expression qui sort automatiquement, comme de l’eau pour éteindre un feu.

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By Younes

9 thoughts on “Les Chroniques d’Oum Zaza : « C’est RIEN, ça passera… »”
  1. J’aime beaucoup les exemples mashaaLlah !
    Je vais essayer sur les adultes en attendant d’avoir des mouflets. Donc si j’ai bien compris, la prochaine fois que quelqu’un se fait mal je dis « cheh » c’est ça ?
    Plus sérieusement, c’est vrai que ça peut être exaspérant d’essayer d’étouffer une réaction spontanée, humaine et surtout sincère. Ceci dit, je me demande si dire à un enfant que c’est normal qu’il pleure ne va pas l’inciter à pleurer plus…
    En tout cas, baraka Allahu fiki pour le temps que tu prends à écrire ces chroniques, puisse Allah les rendre bénéfiques à tous.

    1. MDR, non ça n’incite pas l’enfant à pleurer, ou 30 secondes de plus pour celui qui aime l’attention qu’on lui porte, il ne faut pas non plus lui répéter pendant 30 minutes « mon pauuuuuvre, tu souuuuffres » lol, il faut faire la différence entre la pitié et la compassion 😉 La pitié encourage l’autre à se plaindre, à être mal, la compassion apporte soutien et amour, ça équilibre et aide à sourire =)

  2. salam aleykoum

    J’adhere complétement, mon fils est tombé du vélo, il a pleuré, et jai compris directe que non ce n’était pas rien il sétait cassé la clavicule !

    un peu de reconfort ca fait du bien,l’hsitoire de la maternité on ma dit la meme chose subhana allah ca ma bien bloquée, limite j’en étais génée davoir mal comme si cétait pas humain subhana allah

    vive la compassion ! un peu d’amour ca fait du bien

  3. Salam aleikoum
    absolument pas d’accord….
    on doit apprendre à prendre sur soi, enfant ou adulte, car nous ne sommes pas à plaindre….
    moins de nombrilisme et de se prendre pour le centre des attentions ne nous fera pas de mal
    lorsque mes enfants tombent, je détourne leur attention, ou même je n’interviens pas, ils se relèvent et vaquent à leurs occupations
    ils savent que pour les coups durs, je suis là
    mais ils savent d’abord compter sur eux mêmes, ils savent ce qui est grave ou pas
    et je préfère ça

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