Tout comme les boissons alcoolisées, le jeu de hasard est formellement interdit en Islam. Cela n’a pourtant pas empêché l’autorité des affaires religieuses d’Abu Dhabi d’émettre une Fatwa (Décret Islamique) levant (partiellement) cette interdiction, la Fatwa no: 205/2020.
En effet, le Samedi 18 Avril a connu le lancement de la première loterie dite « halal » du golfe, après un report dû au Covid-19.
Une loterie d’un nouveau type
Chaque Samedi donc, Emirates Loto – nouvelle loterie hebdomadaire – diffusera le résultat de ses tirages via son site Web, son application mobile et ses réseaux sociaux. La cagnotte de ce Loto « béni » promet des prix allant jusqu’à 35 millions de dirhams émirati (environ 8,8 millions d’euros).
Cette loterie bien particulière n’est pas uniquement destinée aux résidents des Émirats arabes unis. Tout utilisateur, des quatre coins du globe, peut également participer (à condition d’être majeur), en achetant une carte à 35 dirhams émirati. Diverses cartes sont proposées, chacune représentant un lieu iconique des Émirates. Un nouveau jeu de huit cartes est imprimé chaque trimestre, les rendant « collector ». Chaque carte permet à l’acheteur de générer six numéros (1-49) via le site Internet ou l’application Emirates Loto.
Les participants ont jusqu’à 17 h 30 chaque samedi pour sélectionner six numéros, entre 1 et 49, ou les laisser être choisis au hasard par la plateforme. Si aucun participant n’empoche le prix maximum, celui-ci augmentera de manière hebdomadaire, aux limites d’un plafond de 50 millions de dirhams.
A noter que deux vainqueurs ont déjà remporté la modique somme de 500.000 dirhams chacun, soit l’équivalent de près de 125.000 €. La loterie « Halal » trouve ses adeptes, visiblement. Pour la petite anecdote, le jour de la première diffusion de résultats, pas loin de 250.000 personnes visitèrent le site en cinq minutes, le faisant planter.
À la tête de l’entreprise privée qui gère ce service se trouve Paul Sebestyen, vétéran endurci par plus de trois décennies d’expérience dans le domaine. Caroline du Sud, Corée du Sud, Pérou… Un Curriculum Vitae bien garni en somme.
Selon l’organisation, l’Américain joue un rôle fondamental dans « l’alignement » de l’entreprise avec « les initiatives du gouvernement des Emirats ».
Exercice de contorsionnisme
Les créateurs de cette loterie déclarent, dans un admirable numéro, digne d’Houdini, laisser aux clients la possibilité de faire respecter le nouveau jeu aux préceptes de l’islam.
« Selon les principes islamiques de la Fatua et de la Charia (législation islamique), il doit y avoir un échange de valeur. L’accès au tirage hebdomadaire est facultatif. Vous pouvez acheter le billet pour ensuite le retirer et refuser la possibilité de participer au tirage », a indiqué le cabinet dans un communiqué.
Emirates Loto déclare en outre que son objectif est de « faire don de millions de dirhams au bien public » sans fournir plus de détails.
« Nous allons collecter des fonds pour changer des vies. Non seulement pour les personnes qui ont eu la chance de gagner, mais aussi pour l’argent qui sera reversé à des associations caritatives et à d’autres organisations qui viennent en aide aux personnes dans le besoin », a déclaré Sebestyen au journal local The National.
Ces termes peinent à convaincre les experts de la finance islamique. Safdar Alam, ancien chef de la division islamique de la banque JPMorgan, affirme au quotidien espagnol Elmundo : « Personnellement, je ne suis pas intéressé par les exercices de gymnastique commerciale pour obtenir l’approbation de la charia. Mes convictions sont fortes. Je ne participerai jamais à quelque chose comme ça. Peu m’importe qui dit « halal ». »
Il ajoute également : « L’idée de savoir si c’est Halal ou non n’est même pas importante. Elle dévalue notre religion. »