La Turquie a dénoncé ce mardi la privation du droit de vote de la minorité musulmane Rohingyas au Myanmar (Birmanie) lors des élections nationales tenues dimanche. Le pays est à majorité Bouddhiste et compte 54 millions d’habitants.
Dans un communiqué, le ministère turc des Affaires étrangères a déclaré que ces élections constituaient une «étape importante» dans le processus de réforme et de démocratie au Myanmar, tout en déplorant : «Néanmoins, la privation du droit de vote des musulmans rohingyas et le rejet des candidatures de nombreux musulmans indiquent une grave lacune en termes d’inclusivité des élections».
Le communiqué conclut : «Nous souhaitons que le nouveau gouvernement prenne des mesures pour remédier à ces lacunes et assurer le renforcement des institutions démocratiques ainsi que des principes et pratiques démocratiques, y compris une représentation sans entrave».
En 2017, Le président turc Erdogan avait appelé les organisations internationales et les pays du monde islamique à coopérer pour mettre fin à l’injustice subie par les musulmans rohingyas tout en ajoutant : «ceux qui ferment les yeux à ce génocide qui se perpétue sous le couvert de la démocratie sont ses collaborateurs».
L’UE a également appelé le Myanmar à réformer son processus électoral. La porte-parole de la Commission européenne, Nabila Massrali, a déclaré dans un communiqué: «L’UE continue d’appeler à la pleine inclusion de tous les groupes ethniques, religieux et minoritaires du pays, y compris la communauté rohingya, et à garantir les droits civils et politiques légitimes de tous».
La citoyenneté des Rohingyas avait été supprimée en 1982 et depuis un véritable nettoyage ethnique s’est déroulé dans la région. Le régime birman, à travers son armée, est également accusé de génocide par la communauté internationale. L’ONU a de son coté qualifié cette politique du régime comme ayant une «intention génocidaire» et a décrit les Rohingyas comme les personnes les plus persécutées au monde.
Ainsi, des centaines de milliers, craignant pour leur vie, ont été forcés de partir presque sans rien sur les routes ; cependant il reste encore 600.000 personnes environ sur place.
N’étant pas citoyens, ces Rohingyas n’ont ni le droit de voter ni de se présenter pour obtenir un siège au parlement. Ceux qui ont essayé d’être candidat n’ont pas pu aller très loin.
C’est le cas d’Abu Tahay qui a créé le parti du Développement de l’Union Nationale mais dont l’enregistrement a été refusée par les autorités birmanes, ainsi que sa tentative de se présenter en tant que candidat indépendant. La raison invoquée par le gouvernement est qu’il n’a pu prouver que ses deux parents étaient citoyens au moment de sa naissance.
Abu Tahay a contesté cela : «Non seulement mes deux parents, mais également mes grands-parents des deux côtés étaient déjà citoyens avant ma naissance».
Il affirme que la loi n’est pas respectée à cause d’une politique d’exclusion des Rohingyas de la société.
De plus, les militaires du pays ont détruits de nombreux papiers d’identité de cette minorité ethnique, les laissant ainsi sans preuves de leur origine.
Plus de 740000 Rohingyas ont fui le Myanmar vers le Bangladesh voisin en 2016 et 2017 alors que l’armée a déclenché une série d’atrocités qui ont vu des villages entiers être incendiés, des exécutions gratuites et des viols. D’autres ont rejoint la Malaisie, le Pakistan et l’Arabie Saoudite.
La lauréate du prix Nobel de la paix Suu Kyi qui est devenue leader civil en Birmanie a été critiquée internationalement pour sa tentative de justification de cette répression et sa défense des généraux birmans.
Il faut également saluer le fait que les organisations caritatives turques avaient uni leurs forces, après le déplacement massif des musulmans rohingyas en 2017, et avaient collecté des millions de livres pour faire face à l’urgence humanitaire que subit cette ethnie. Ces organisations comprennent le Croissant-Rouge turc, l’Autorité turque de gestion des catastrophes et des situations d’urgence (AFAD), et l’Agence turque de coopération et de coordination (TIKA).