Le 19 décembre 2008, Fatima Afif, une éducatrice, salariée de la crèche Baby-Loup de Chanteloup-les-Vignes dans les Yvelines, a été licenciée pour « insubordination, menaces et faute grave ».
Ce que son employeur lui reprochait surtout, c’était son voile qu’elle a refusé de retirer après son retour de congé parental. Loin de se laisser intimider, l’éducatrice a contre-attaqué en portant l’affaire en justice, accusant son employeur de « discrimination au regard de ses convictions religieuses et atteinte aux libertés fondamentales ».
Le gratin politique avait suivi de près l’affaire, ainsi Manuel Valls, alors député-maire PS d’Evry, la philosophe Elisabeth Badinter, marraine de la crèche, Jeannette Bougrab, la présidente de la Haute Autorité de lutte contre les discriminations et pour l’égalité (Halde), Louis Schweitzer, se sont même déplacés lors des différentes audiences.
Après moult péripéties judiciaires qui ont permis à la crèche d’avoir dans un premier temps gain de cause, le Comité des droits de l’homme de l’Organisation des Nations unes, saisit par la plaignante, vient finalement de donner raison à la salariée voilée, rapporte L’Obs ce vendredi 24 août.
Cinq ans auront été nécessaires pour que Fatima Afif obtienne enfin justice après que la Cour de cassation ait confirmé le licenciement pour faute grave en juin 2014.
Les avocats de Fatima, Claire Waquet et Michel Henry, ont, en dernier recours, déposé une requête le 18 juin 2015 auprès du Comité des droits de l’homme de l’ONU.
Et le 10 août dernier, les experts indépendants du Comité ont rendu leur décision, condamnant la France pour violation des articles 18 et 26 du pacte international relatif aux droits civils et politiques.
Selon le Comité, le port du voile islamique ne peut être considéré comme « un signe extérieur fort » ou « ostentatoire » et « constitutif d’un acte de prosélytisme ».
Outre cette condamnation, l’Etat français est tenu de rendre ces constatations publiques et de proposer une indemnisation à la plaignante sous 180 jours. La France devra, par la même occasion, prendre « toutes les mesures nécessaires pour prévenir des violations similaires à l’avenir ».
Cette décision qui fait jurisprudence est d’une importance capitale pour toutes les affaires similaires. Les femmes voilées victimes de discrimination sur leur lieux de travail ne manqueront pas de l’utiliser à bon escient.