Il est vrai que les musulmans de France écrivent trop peu. Trop peu pour se défendre, pour s’exprimer ou tout simplement pour partager. C’est regrettable c’est sûr car du coup le dialogue à notre sujet se fait par procuration entre hommes de droite, hommes de gauche, hommes de ni-droite ni-gauche… et parfois quelques femmes. Donc le premier appel de cet édito sera clair : musulmans de France, écrivez. Ecrivez des essais, des romans, des poèmes, des articles, bref ce que vous pouvez, mais écrivez car s’enfermer dans notre propre silence est un aveu de faiblesse et d’impuissance. Ecrire au contraire, avec une intention sincère et le courage de ses idées et de ses valeurs est à coup sûr un acte noble, et un acte pieux, car comme le dit le proverbe « les paroles s’envolent, les écrits restent ».
Des écrits affichés sur l’Islam justement il y en a eu beaucoup, trop peut-être, ces derniers temps. Il suffit de faire une recherche sur Amazon pour trouver par exemple : « Il était une foi, l’islam » en deuxième position des meilleures ventes sur l’islam, un livre autobiographique d’un musulman qui a renié sa foi… Ou encore, « Penser l’Islam » de Michel Onfray, pseudo-philosophe athéiste militant qu’on ne présente plus qui estime entre autres que « l’islam est ‘fondamentalement incompatible avec les sociétés issues des Lumières' » et que « le musulman n’est pas fraternel ». Il y a évidemment beaucoup de livres de Chebel et Bencheikh, qui n’ont semble-t’il aucune difficulté à se faire éditer eux, et les grands classiques traduits depuis plusieurs siècles…
Il y a aussi quelques livres évènements comme la « Grande histoire du monde arabe » de François Reynaert qui tente de retracer l’histoire de l’Islam… ou plutôt des Arabes… ou plutôt des deux… enfin je suis plus très sûr après avoir lu le livre. L’initiative n’était pas vaine toutefois et reste à saluer : « De l’Orient, la plupart d’entre nous n’ont que de vagues connaissances encombrées par quelques clichés : Les Mille et Une Nuits, l’Andalousie et ses jardins parfumés, les turbans et les odalisques des toiles du XIXe siècle. » mais il semble que l’historien ait eu du mal à contourner, malgré ses trois ans de recherche, les clichés et approximations de toutes les sources orientalistes utilisées, j’ai nommé Bernard Lewis, Albert Hourani et consorts…
Le deuxième message de cet édito s’adresse donc aux éditeurs et chercheurs sur l’Islam: comme l’aurait dit Ali Ibn Abi Talib « chercher conseil c’est aller à la fontaine du savoir. » Trop souvent on se contente malheureusement des restes de pluie…
Passons-donc au troisième message. Après les livres que nous n’écrivons pas malheureusement sur l’Islam et les musulmans, les livres, écrits certes mais insultant, fausseurs ou simplement approximatifs sur l’Islam et les musulmans, il reste les livres, tout aussi nombreux voire plus encore, qui ne parlent ni d’islam ni de musulmans, mais qui au contraire cherchent à nous exclure.
J’ai nommé les succès de librairie des Zemmour, Finkielkraut, Gallo, et autres chantres de l’identité nationale. Saïd Bouamama aura beau eu essayé de dénoncer « La manipulation de l’identité nationale » en 2011 (Ed. du Cygne), il semble que les efforts se poursuivent, et même s’accélèrent à mesure que les élections présidentielles approchent.
Evidemment le principe est toujours le même, l’inversion des faits : ce n’est pas nous qui rejetons les autres, ce sont eux qui ne veulent pas s’intégrer. Et dans les « eux » on nomme à demi-mot ou ouvertement les musulmans insoumis (ou plutôt trop soumis à Allah peut être…)
Natacha Polony s’est récemment invitée au débat houleux identitaire et édite chez Plon un « Nous sommes la France » qui s’annonce déjà comme un best-seller en librairie. Ne condamnons le livre avant de l’avoir lu, mais certains extraits publiés dans le Figaro magazine nous laissent déjà présager le pire sur l’image incessamment rabaissée, des musulmans, des quartiers, des immigrés, et de tout ce qui nous assemble ou ressemble…
Dans une conclusion hâtive, je décide donc de clore cet édito, en disant tout simplement et ce sera mon troisième et dernier message : quelle que soit l’histoire racontée, quelle que soit l’image écornée transmise, quels que soient les jugements de valeurs et critiques reçues, nous musulmans et musulmanes de France et Navarre, malgré notre niveau de pratique et attachement à notre foi, Nous sommes aussi la France. Likez sur Facebook et sur Twitter
Par Ibn Battuta