Mosquée de Cordoue : les tentatives pour minimiser son héritage islamique séculaire

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Cordoue, la cité andalouse, est le théâtre d’une controverse qui ne cesse de croitre autour de la célèbre mosquée de Cordoue.  Elle est devenue depuis 1998 propriété de l’église catholique  ibérique et de nombreuses voix s’élèvent et récusent la stratégie à l’œuvre pour effacer son héritage islamique séculaire.

Première attraction touristique de la ville, déclarée patrimoine mondial de l’Unesco depuis 30 ans,  elle est à la fois un monument majeur de l’art musulman et une cathédrale chrétienne depuis le Moyen Âge. L’an passé, la « mosquée cathédrale » a vu défiler plus d’1,5 million de visiteurs, soit une manne financière de plus de 10 millions d’euros pour les caisses de l’église. Une rente qui aiguise donc les appétits.

Fondée  en 786 sous le règne de l’émir Omeyyade Abd-Al-Rahman 1er, elle est un des multiples vestiges du rayonnement islamique sur la péninsule ibérique qui dura du VIIème siècle au XVème siècle. Cordoue fut du temps de la domination musulmane, l’un des principaux lieux de culte de l’islam en Europe. Quand la ville fut reprise par le roi castillan Ferdinand III au XIIIème siècle, il en fit une église puis une cathédrale.

Aujourd’hui le terme mosquée est volontairement diminué voir effacé. Les dépliants touristiques ne le mentionnent même plus ,et la nomment simplement « Sainte Eglise Cathédrale », idem pour le site web dédié. Aussi les citoyens espagnols ,soucieux de préserver ce passé riche et indissociable  de l’identité de leur ville, n’acceptent pas cette tentative d’usurpation et ont crée un groupe de pression intitulé « Mosquée Cathédrale patrimoine de tous ». L’objectif est d’empêcher l’autorité ecclésiastique de réécrire l’histoire de leur cité.

Grâce à une réforme législative du parti populaire de José María Aznar, le diocèse de Cordoue a pu prendre possession des bâtiments religieux qui n’avaient pas de propriétaire officiel jusqu’à cette date (1998). Ainsi José Juan Jiménez, porte-parole du diocèse, affirme que l’église est « propriétaire légitime » depuis 1236.

Pour Michel Santiago, porte parole des opposants à la spoliation de l’héritage islamique, rappelle que jusqu’à présent: « tous les évêques de Cordoue s’étaient sentis (…) comme des protecteurs, pas comme ses propriétaires ».  Or la direction actuelle prise par le diocèse est manifestement d’effacer le passé musulman du pays

Le groupe citoyen va plus loin et pointe l’appétence pour la manne financière touristique qui est à ses yeux la principale raison de cette volonté doublée d’une amnésie historique grossière. L’association dénonce également la stratégie de gestion culturelle et touristique du monument.

« La mosquée-cathédrale est l’axe culturel de la ville, sa principale entreprise touristique. Changer son nom, c’est aller à l’encontre des intérêts touristiques de Cordoue et, c’est plus grave, contre son essence historique, artistique et symbolique », estime Miguel Santiago.

L’Église minimise le passé de la mosquée et évoque simplement une «intervention islamique» dans son architecture, ou encore juste une «empreinte» de l’Islam.

A l’écart de la polémique, les musulmans de Cordoue déplorent   « la tentative de changement de l’histoire du bâtiment et d’effacer l’appellation mosquée » et ajoutent : « cela nous blesse ».  Kamel Mejelef, qui préside l’association des musulmans de Cordoue souligne tout de même que : « Les gens lorsqu’ils viennent à Cordoue, viennent voir la mosquée, pas la cathédrale ». Il faut rappeler que malgré plusieurs demandes, il a toujours été refusé à la communauté musulmane locale de prier dans l’édifice.

Le groupe « Mosquée Cathédrale patrimoine de tous » réclame que le lieu soit public et cogéré avec le diocèse. Car Miguel  Santiago souhaite que l’on préserve « l’image de Cordoue, celle d’une ville ouverte et de consensus où prévalent la concorde et la cohabitation ».

Le groupe de pression a déjà recueilli plus de 380 000 signatures sur la pétition mise en ligne sur change.org.

L’universitaire madrilène Maria Angeles Querol résume en quelques mots l’identité unique de ce vestige de l’histoire nationale espagnol :

«En tant que cathédrale, elle est semblable à toutes les andalouses. Mais en tant que mosquée elle est unique »

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By Younes

4 thoughts on “Mosquée de Cordoue : les tentatives pour minimiser son héritage islamique séculaire”
  1. Subhan’Allah, c’est difficile à comprendre. Les autorités chrétiennes de l’époque post-Omeyaddes avaient elles mêmes amèrement regretté leur décision de transformer la mosquée en cathédrale, au vu du résultat obtenu.

    C’est dommage, cet édifice est quand même une jolie démonstration de la cohésion entre les ahlul kitab.

  2. chef d’oeuvre de la civilisation islamique d Andalousie, capitale du califat omayade, école d ou sortirent de nombreux savants et hommes d état de cette région du monde qui fut la lanterne de la science en terre d’occident.

  3. j’avais vu un reportage sur l’Andalousie. Quand la mosquée a etait changé en cathédrale le roi de cette époque avait dis , je cite  » Vous avez enlever cette chose que l’on voit nul part pour me mettre un truc que l’on voit partout!  » Il parlait de l’architecture Arabo-musulmane. Le reportage était vraiment top.

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