A l’approche des élections municipales en mars 2014, l’électorat musulman redevient progressivement plein de promesses pour des partis en quête de voix, dans un contexte où la scène politique est plus critiquée que jamais par des français sceptiques.
Il est extrêmement intéressant de noter le décalage qu’il existe entre la perception des individus de tendance plutôt « anti-musulmane » – qu’elle revienne à de la haine ou à de l’islamophobie moins assumée – et les musulmans eux-mêmes, vis-à-vis des stratégies électorales françaises.
Si les musulmans estiment qu’ils ne sont pas du tout représentés et que les attaques à leur encontre empirent chaque jour comme le prouvent les différents bilans d’associations et les lois exclusives à leur égard, leurs détracteurs estiment qu’ils mènent la danse et que les gouvernements français successifs n’ont qu’un objectif, leur plaire. Enquête à ce sujet.
Exception faite pour la droite ?
Le 18 février dernier, Jean-François Copé et François Fillon juraient en chœur qu’il n’était « pas question de cibler » l’électorat musulman, en vue des prochaines élections. En effet, l’UMP et la droite en général ont conscience de l’absence quasi-totale de leur popularité dans la Oumma, résultat selon eux d’une « très grosse compagne d’intox de la gauche contre Nicolas Sarkozy ».
Un dilemme se pose depuis : tenter de regagner quelques points auprès de nos « charmants » citoyens musulmans, ou rassurer la frange islamophobe qui leur assure une certaine pérennité ?
Lors de sa visite en Israël fin janvier, Fillon a été interpellé lors de sa conférence. Son interlocuteur lui a demandé si les « 5 millions d’électeurs musulmans n’étaient pas les maîtres du jeu »… Un pouvoir que les musulmans semblent ignorer eux-mêmes alors ?
Fillon se veut alors confiant : « Évidemment, il faut que tout le monde respecte les règles de la laïcité, a-t-il précisé. Il faut que toutes les religions s’y conforment, donc il faut que la religion musulmane, puisque le problème aujourd’hui est celui-là, s’y conforme », en ajoutant que ce respect passait par une meilleure maîtrise du flux de l’immigration…
Pourtant, immigré n’étant pas égal à musulman, musulman n’étant pas égal à électeur, et surtout les immigrés n’ayant pas le droit de vote en France (contrairement à la promesse du président actuel), nous avons du mal à saisir le lien entre l’accusation – implicite – faite aux musulmans de gouverner la France et l’immigration.
Faut-il rappeler qu’en une autre époque pas très lointaine, un autre gouvernement européen a estimé que les juifs gouvernaient l’Europe et devaient ainsi mourir dans des camps ? L’idée véhiculée est donc extrêmement sérieuse, et sa gravité ne doit pas être prise à la légère. Notez aussi que l’idée que le musulman dirige la France est quotidiennement reprise par les torchons d’extrême-droite qu’on trouve à la pelle sur le web.
Néanmoins, la droite française tire tout son intérêt du dégoût massif des musulmans à l’égard de la politique du PS et espère rallier bien des voix, en toute discrétion oblige.
Que nous veut la Gauche française ?
Il semblerait que du côté de notre bonne vieille gauche, l’adage soit « plus c’est gros, plus ça passe ». Après la promotion d’officines anti-racistes comme « Touche pas à mon pote » ou « SOS Racisme » qui servait de justesse à faire oublier la tradition coloniale des socialistes à travers l’Histoire, il semblerait que le PS ait parfaitement su exploiter la peur de beaucoup d’entre nous.
En effet, nous étions très nombreux à penser qu’entre la peste et le choléra, mieux valait-il choisir François Hollande à un Sarkozy très impopulaire ou pire, un Front National qui n’a jamais, pour sa part, caché sa malveillance à l’égard des musulmans.
C’est désormais chose faite, mais après la polémique du « mariage pour tous », de la guerre au Mali ou plus récemment de la « Gender theory », l’électorat musulman potentiel est bien mal acquis.
Nous vous relations alors l’hommage d’Hollande à la Grande Mosquée de Paris, qualifié depuis d’ « islamo-collabo » par ses habituels détracteurs. Certains de nos lecteurs relevaient alors, avec beaucoup de justesse, qu’il n’était pourtant pas question de rendre hommage lorsque plusieurs musulmanes sont agressées à travers tout le pays ! Stratégie ?
Ne soyons plus jamais dupes des manœuvres électorales quelles qu’elles soient, et prenons la parole avant qu’on nous la donne afin que les musulmans représentent un certain poids, conforme enfin au fantasme de certains !
La France et sa communauté musulmane, qu’elle fut coloniale ou désormais citoyenne et multiculturelle, reste une histoire très ambiguë… un vieux roman à l’eau de rose sur le mode « Je t’aime, moi non plus ».
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