Par : Tamime Khemmar
Je voudrais raconter brièvement l’histoire d’un de mes cousins qui s’empara du Minbar de notre mosquée après la mort de son père, mon oncle, malgré mon refus et celui de toute la famille.
Mon oncle était profondément soufi et entretenait un rapport très étroit avec la tombe de mon grand-père qui est enterré, lui et une autre personne, à l’intérieur de la mosquée, loin de la Qibla bien sûr.
Non seulement ce malheureux cousin a hérité de la conduite de son père très lointaine de la guidance de Notre Prophète, mais il en est arrivé au point d’appeler les gens lors de la Khotba (discours) du vendredi à invoquer les morts ; mon grand-père et son compagnon en premier bien sûr. Ceci est, comme tout le monde le sait ou doit le savoir : un chirk majeur qui expulse sont auteur de l’Islâm.
Cette situation dura plus de quinze années, puis Allah décida de mettre fin à la vie de mon cousin ; il tomba malade, puis, nous quitta.
Quelle fut ma conduite avec mon cousin Imam ?
Au début, bien sûr, j’ai essayé de l’empêcher, par la parole, de monter injustement sur le minbar, car il était ignorant et presque illettré. Je ne pus faire cela, car une partie de la famille le soutenait et l’autre partie soit avait peur de lui soit n’accordait à cela aucune importance.
Lorsqu’il fut installé sur le minbar et qu’il commença sa descente progressive vers le chirk, faisant de la mosquée un lieu de cultes inventés « très folkloriques et très amusants » et que la chambre des tombes fut ouverte afin d’accueillir les visiteurs pleins d’espoir en l’étrange pouvoir des enterrés, pleins de sous et vides de toute connaissance religieuse essentielle comme at-tawhîd (l’unification d’Allah), bref lorsque tout cela commença, je fis plusieurs tentatives de discussion avec lui en essayant de lui montrer le danger dans lequel il s’engouffrait, lui et ceux qu’il appelait à le suivre.
Il se moqua de moi et, pendant plusieurs années, me combattit moi et ma famille, lui et ses alliés, en secret et en public, par des moyens matériels et immatériels (comme la sorcellerie), mais il n’arriva à me porter que le seul préjudice qu’Allah m’a prédestiné dans cette vie.
J’ai essayé aussi de ne pas lui parler et de lui montrer ma grande colère à son encontre afin qu’il prenne conscience de son état et arrête d’égarer les gens. Mais rien n’y faisait. Au contraire, cela l’arrangeait, car, en le mettant à l’écart de ma vie, c’est moi en réalité qui était à l’écart de la famille et lui laissait le champ libre pour entraîner avec lui sa petite famille qui n’était pas si petite que cela : cinq garçons et trois filles, ainsi que la grande famille et le quartier tout entier.
J’adoptai donc la dernière et seule conduite qui me restait et qui allait apporter le meilleur résultat : la bienfaisance.
Je me comportais avec lui de la meilleure des manières ; lui envoyant des plats et des gâteaux, lui rendant service, lui rendant visite lorsqu’il était malade… bref j’entretenais avec lui les meilleurs rapports malgré que chaque vendredi il incitait les gens en public à venir invoquer les morts et me traitait moi et mes semblables des pires noms.
À la fin, et toute chose à une fin, il nous quitta et laissa derrière lui sa femme, ses filles et quatre garçons, pères de famille, qui n’ont hérité ni sa conduite ni sa croyance (ou plutôt son incroyance). Car, le long de ces quinze années, lors de notre combat incessant, celui du bien contre le mal, il y avait un public silencieux qui regardait, écoutait, réfléchissait et comparait entre ma conduite et sa conduite, entre ma moralité et sa moralité, entre ma croyance et sa croyance, entre le Dieu que j’unifie et que j’invoque et les morts qu’il invoque, en les associant à Allah dans l’essence même de Sa ‘ibâda (adoration) : l’invocation. Puis, par la grâce d’Allah, ils ont fait le bon choix.
Lorsque je revins à lui amical et convivial, malgré nos grands différends, et malgré sa nuisance continue à mon égard, je voyais toujours derrière son dos ces petits yeux qui me fixaient du regard et je lui disais en moi-même : « Si toi tu ne m’écoutes pas, ceux-là m’écouteront peut-être. »
Epilogue : Je voudrais souligner une chose importante que beaucoup de mes frères et de mes sœurs ignorent : Pour réaliser n’importe quelle chose à laquelle on aspire, il y a une conduite à adopter et des moyens à employer. Et cette conduite et ces moyens peuvent ne pas convenir à nos envies et même aller à l’encontre de nos aspirations, bref ne pas nous plaire. Or, comme Allah a tracé la route qui mène d’une ville à une autre, qui n’est jamais une ligne droite et directe, aussi, Il a établi une conduite est des moyens pour apporter le changement auquel on aspire dans n’importe quel domaine. Si l’on prend la bonne route, on arrive, sinon en reste toujours loin de notre objectif.