TURQUIE: Jusqu’où la propagande des médias français ira-t’elle

Nous sortons de notre réserve habituelle et de notre ligne éditoriale qui focalise sur les bonnes nouvelles pour exprimer notre ras-le-bol suite à l’incessant remue-ménage des médias français ces derniers jours sur ce qui fait maintenant la une des journaux à grande audience: La Turquie et ses ambitions régionales.

Pourquoi ce ras-le-bol?
Pour 4 raisons exactement.

1. L’hypocrisie

Oui il n’y a pas de mots, hypocrisie. Car ce sont plusieurs dizaines d’articles de grand tirage qui ont été rédigé ces derniers jours sur ce qui vaut l’opprobre du monde entier à Recep Tayib Erdogan: la réouverture de la mosquée Sainte-Sophie.
Car oui il s’agit d’une réouverture. Et il ne s’agit aucunément d’une reconversion de la basilique comme voudraient vous le faire croire ces plumes qui attisent les braises pour enflammer les coeurs contre le « péril vert ». Parler de conversion d’une basilique en mosquée est doublement faux: le mot conversion est faussé car c’est une mosquée depuis plus de 570 ans, et deuxièmement parler de basilique est incorrect car ce n’est plus techniquement une basilique non plus.  La mosquée était musée depuis 86 ans, mais elle était aussi et surttout pendant plus de six siècles avant cela une mosquée centrale dans l’empire ottoman car la mosquée où officiaient les grands de l’empire depuis la conquête de Constantinople en 1453. Alors oui Sainte-Sophie fut jadis c’est à dire avant 1453 une basilique. Mais elle ne l’est jamais redeveue depuis. Nous voilà face au procès de l’histoire que certains voudraient réécrire et, qui sait, peut être refaire de Sainte Sophie une église après une croisade en Turquie. Quoique. Rappelons tout de même que les chrétiens de Byzance n’étaient pas en si bons termes avec les chrétiens d’occident. On peut ainsi rappeler le sac de Constantinople par les Croisés en 1204 dont personne ne parle aujourd’hui…

Si on n’était pas hypocrite et qu’on se contentait de lire ce coup politique d’Erdogan comme ce qu’il est (ni plus ni moins qu’un message à son peuple que la laïcité n’est plus la doctrine d’Etat), on pourrait dès lors parlait des innombrables mosquées andalouses ou siciliennes ou grecques reconverties en Eglise ou musées. Oui la Grèce a été ottomane du XIVème siècle au XIXème siècle et pourtant on n’en parle jamais. De même que l’Andalousie a été musulmane pendant plus de 7 siècles et pourtant aucun musulman andalou aujourd’hui peut remonter son histoire à ses aïeux…
Moins de 5% de la population grecque est aujourd’hui musulmane et les mosquées se font rare car beaucoup ont été violemment détruites. Mais on n’en parle jamais non plus. De même que la suppression pure et simple du passé musulman du Sud de nombreux pays européens…

2. Le parti pris

Nous nous sommes pas un journal qui traite de géopolitique. Et la question lybienne est bien trop compliquée à comprendre sans une vraie compréhension des enjeux géopolitiques. Pourtant on pourrait lire simplement les faits entre certains supporters d’un maréchal Haftar belliqueux au passé douteux et nullement reconnu par la communauté internationale, un transfuge de Khaddafi passé par le Kremlin et Langley, soutenu aujourd’hui par quelques chancelleries occidentales et par son voisin Sissi. Et de l’autre côté un gouvernement certes transitoire mais élu, et reconnu par l’ONU. La Turquie aide aujourd’hui ce gouvernement. Est-ce que la Turquie est altruiste? Sûrement pas. Mais en même temps qu’est ce que la France a à faire en Lybie? Pourquoi ne pas demander au peuple de France son avis avant d’engager une frégate et risquer un enflammement régional? Pourquoi la France et pas l’Italie qui est en face de la Lybie ou encore les Etats Unis qui ont des enjeux importants sur place. Pourquoi la France se mêle t’elle des affaires lybiennes de façon si continue depuis des décennies. Chirac était en Lybie. Sarkozy était en Lybie et voilà maintenant Macron qui s’y mêle… Alors reprocher à Erdogan d’être utilitariste sur le sud de la Méditerrannée pourquoi pas, mais dans ce cas, il faudrait que la France se retire complètement de ces affaires aussi.

Autre exemple, les explorations pétrolières en Méditerrannée. La carte ci dessous montre les explorations turques démarrées cette semaine en méditerrannée orientale pour rechercher du pétrole. Encore une fois nous ne sommes pas géopoliticiens. Mais tout de même il semble évident que l’exploration est très proche de la Turquie, à vrai dire à seulement 2km du littoral. Pourtant les médias français parlent de dangeureuse escalade militaire, de politique expansionniste, etc. Bref on nous faire croire à un envahissement militaire de la Méditerrannée par les Turcs… bien loin de la réalité actuelle.

3. La question des réfugiés

Cette question est régulièrement traitée aussi avec un flot de mensonges et de manipulations dans les médias ces derniers temps. Et on joue avec le feu là aussi car parler d’invasion de réfugiés (comprendre musulmans…) en Europe c’est faire le lit des extrêmes… Oui il y a de nombreux réfugiés en Turquie qui essaient de gagner l’Europe. Il y en a aussi plus de 3 millions qui restent en Turquie et veulent y refaire leur vie. Si quelques dizaines de milliers de ces réfugiés veulent partir en Europe et que le pouvoir turc y voit une occasion de discuter voisinage cela nous semble légitime. Mais même cela ne l’était pas nous ne pouvons victimiser la Grèce soi-disant envahie de réfugiés alors que ces réfugiés ont déjà envahi la Turquie et que personne ne s’en est préoccupé. Et puis pourquoi ne pas parler des causes de ces vagues migratoires sans précédent dans l’histoire de l’humanité? Et arrêter de laisser ces gens à la merci des passeurs malhonnêtes.

4. La question de l’islamisme du pouvoir turc

Que le pouvoir turc soit aujourd’hui aimé ou décrié il y a une realité qu’il ne faut pas occulter: le peuple turc est un peuple musulman en grande majorité. Et fier de sa religion. Que le religion soit ensuite utilisée ou non par le pouvoir, cela nous importe peu. Le vrai problème est de faire un procès d’intention à tout un peuple qui est aujourd’hui plus pratiquant qu’il y a quelques décennies à peine. Cet islam là est apprécié des visiteurs de la Turquie qui y voient un peuple accueillant, fier de ses traditions religieuses et ouvert à la rencontre avec des gens de tout horizon. Gardons en tête et transmettons cette image là de la Turquie.

Que cet Islam soit une fierté, oui le peuple turc en a besoin pour se reconstruire dans l’unité car il traverse une crise politique très difficile après une tentative d’assassinat du président Erdogan et de coup d’état il y a deux ans à peine et une crise économique qui se profile avec le Corona.

Médias français et francophones, de grâce, laisser donc le peuple turc et son pouvoir en paix. Nous n’avons pas besoin de semer la haine et la France a bien mieux à faire ces jours-ci que de se préoccuper des affaires turques…

 

By Younes

One thought on “TURQUIE: Jusqu’où la propagande des médias français ira-t’elle”
  1. La frégate Française dont vous faites allusion était en mission pour l’OTAN dans le cadre de l’opération « Sea Guardian » afin de faire respecter l’embargo sur les armes en Libye décrété par l’ONU. Il ne s’agissait donc pas des affaires française comme vous dites.
    Un avion de surveillance américain a contacté la frégate française pour contrôler un bateau turc soupçonné de transporter des armes (soupçon finalement avéré transportant des chars lourds). A ce moment là, la frégate française a été illuminée par la marine turc. Dans le jargon marin c’est une déclaration de guerre et la frégate française courbet aurait pu faire feu.

    Concernant la prospection de gaz par l’Oruç Reis, la position indiqué sur votre carte est totalement fausse aujourd’hui.
    Il suffit de regarder le site marinetraffic pour se rendre compte de la position réelle du navire (entre la crête et Chypre et non loin des eaux Égyptiennes).
    https://www.marinetraffic.com/en/ais/home/shipid:4614951/zoom:10

    Concernant l’implication de la France auprès de la Grèce, la encore, les traité de l’UE prévoient de porter assistance aux membres menacés.

    Finalement, il ne s’agit pas des affaires de la France, mais étant la plus grande puissance militaire de l’UE, c’est la seule en tant que membre, capable de déployer des moyens dans le cadre de l’UE, l’OTAN et l’ONU dans la zone.

    La Turquie joue a un jeu extrêmement dangereux, la zone est une poudrière. Des lignes ne sont pas à dépasser, dans quel cas plusieurs pays risquent de s’unir contre la Erdogan et je doute que la Turquie ait les moyens de ses ambitions.
    Il y a des tors de chaque côté mais Erdogan cherche les ennuis en provocant sans cesse les autres.

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