La Gambie a porté plainte, ce lundi 11 novembre, contre l’État birman auprès de la Cour internationale de justice (CIJ) en dénonçant un génocide visant la minorité musulmane rohingya.
Une démarche que l’on pourrait qualifier d’exceptionnel venant d’un pays comme la Gambie, située à 12 000 km du Myanmar, et logée dans un continent voisin.
La Gambie vole au secours de la minorité des Rohingyas en Birmanie, victime d’un «génocide»
Elle s’appuie sur la Convention sur le génocide, qui oblige tout Etat à empêcher la perpétration d’un tel crime, considéré comme le plus grave de tous.
A juste titre le Myanmar et la Gambie sont tous deux signataires de la Convention sur le génocide de 1948, qui non seulement interdit aux États de commettre un génocide, mais oblige également tous les États signataires à prévenir et à punir le crime de génocide.
Au nom des 57 pays membres de l’Organisation de la coopération islamique, les autorités de Banjul, la capitale gambienne, accuse Naypyidaw de génocide, de viols et autres actes de violence à caractère sexuel contre les femmes rohingyas. La plainte a été déposée à la CIJ par le ministre de la Justice gambien, Abubacarr Tambadou.
« Le génocide concerne l’humanité toute entière », a expliqué à La Haye le ministre de la Justice gambien, et la Convention sur le génocide impose aux États de le prévenir par tous les moyens.
Cette Cour de l’ONU basée à La Haye, est chargée de régler les différends entre États. En préparation depuis plusieurs mois, cette plainte est portée par Banjul au nom de l’Organisation de la coopération islamique.
La Gambie, le plus petit pays du continent africain
« Le monde ne peut pas rester les bras croisés » a déclaré le ministre gambien de la Justice devant la Cour internationale de justice.
« C’est une honte pour notre génération de ne rien faire pendant que le génocide se déroule sous nos yeux. »
La procédure devant la CIJ pourrait prendre des années, mais la Gambie demande à ses juges d’imposer dans un premier temps des mesures d’urgence. Notamment, d’ordonner à la Birmanie de stopper les actes en cours pour protéger les 600 000 Rohingyas qui se trouvent toujours dans le pays. Des audiences pourraient se tenir en décembre.
Mr Tambadou rapporte avoir été très touché après avoir visité des réfugiés rohingyas au Bangladesh en mai 2018, et notamment après avoir écouté leurs récits. « Je pense que ce n’est pas juste et que le monde ne peut pas rester les bras croisés et regarder cela se reproduire ».
Avant d’être nommé ministre en 2017, Mr Tambadou travaillait au Tribunal pénal international pour le Rwanda comme procureur, après le génocide rwandais.
Des militants soulagés
Saluons le geste d’Akila Radhakrishan, Présidente du World Justice Center, qui a participé aux efforts pour porter cette affaire devant la CIJ.
Les militants rohingyas ont notamment exprimé leur soulagement d’avoir enfin un tribunal au sein duquel leur expérience peut être discutée et surtout qualifiée de génocide :
« C’est un événement monumental pour la communauté rohingya, qui a tant enduré », a déclaré la militante canadienne Yasmin Ullah. Elle appelle les autres nations à se joindre à la Gambie dans le processus engagé devant la CIJ.